


Par Lex Thielen, avocat à la Cour.
S’il s’agit d’un bail de logement, l’article 12 de la loi du 21 septembre 2006 sur le bail à usage d’habitation prévoit les diverses conditions à respecter en cas de résiliation du bail.
- Résiliation pour besoin personnel du bailleur
Le bailleur invoquant le besoin personnel peut résilier le bail à son échéance lorsqu’il est à durée déterminée, respectivement avec un préavis de 6 mois s’il s’agit d’un bail à durée indéterminée. Il y a lieu de noter que l’acquéreur d’un logement donné en location qui souhaite l’occuper lui-même – ou le faire occuper par un parent ou allié jusqu’au 3e degré inclusivement – doit impérativement envoyer au locataire une lettre recommandée de résiliation du bail endéans les trois mois depuis l’acquisition du logement.
La loi prévoit des formalités spécifiques pour la résiliation du bail pour besoin personnel du bailleur, qui sont plus strictes qu’en cas de résiliation pour d’autres raisons. Les conditions de forme sont les suivantes :
• la résiliation doit se faire par écrit,
• la lettre de résiliation doit être envoyée par courrier recommandé à la poste avec avis de réception,
• la lettre doit énoncer les raisons à la base de la résiliation du bail,
• il faut joindre, le cas échéant, des pièces prouvant les raisons invoquées, sans que la loi ne spécifie toutefois de quelles pièces il s’agit.
Par ailleurs, la lettre de résiliation doit - sous peine de nullité – mentionner le texte du paragraphe (3) de l’article 12 de la loi du 21 septembre 2006 sur le bail à usage d’habitation qui énonce les conditions dans lesquelles le bail peut être résilié pour besoin personnel. La loi ne précise pas ce qu’elle entend par "mentionner" : faire une référence au texte ou le citer intégralement ? Vu l’importance des conséquences possibles, nous estimons qu’il est plus prudent de le citer en entier. Etant donné que des lecteurs nous ont posé des questions à ce sujet, nous reproduisons ci-dessous ce texte – assez long ! - qui est le suivant :
"Par dérogation à l’article 1736 du Code civil, le délai de résiliation dans les cas prévus au paragraphe (2), point a, est de six mois. La lettre de résiliation doit être écrite, motivée et accompagnée, le cas échéant, de pièces afférentes et s’effectuer par voie de lettre recommandée à la poste avec avis de réception. Elle doit mentionner, sous peine de nullité, le texte du présent paragraphe.
Dans les trois mois de l’avis de réception à la poste, le locataire peut, sous peine de forclusion, demander une prolongation du délai de résiliation au juge de paix. En l’absence de cette demande, le bailleur peut demander au juge de paix une décision autorisant le déguerpissement forcé du locataire après l’écoulement du délai de résiliation de six mois. Toutefois, le locataire pourra encore introduire une demande en sursis à l’exécution de la décision, conformément aux articles 16 à 18. Dans ce cas, le déguerpissement du logement par le locataire doit impérativement avoir lieu au plus tard quinze mois après la date d’envoi de la lettre de résiliation du bail. La décision autorisant le déguerpissement forcé du locataire ne sera pas susceptible d’opposition ou d’appel.
En cas de demande de prolongation du délai de résiliation, les parties seront convoquées dans les deux mois à l’audience. Sauf si la demande est sérieusement contestable ou contestée, le juge de paix accordera une prolongation du délai au locataire à condition que celui-ci justifie avant l’expiration du délai initial de six mois, par voie de pièces, soit être en train de construire ou de transformer un logement lui appartenant, soit avoir loué un logement en construction ou en transformation, soit avoir fait des démarches utiles et étendues en vue de la recherche d’un nouveau logement. La prolongation du délai ne pourra en aucun cas dépasser de douze mois la date d’expiration du délai initial de six mois. La faveur du sursis, prévue aux articles 16 à 18, ne sera plus applicable. La décision accordant ou refusant la prolongation du délai vaudra de droit titre exécutoire en vue d’un déguerpissement forcé du locataire après l’écoulement du délai. Elle n’est pas susceptible d’opposition ou d’appel."
- Résolution pour faute du locataire
Le bailleur peut demander au juge de mettre fin avec effet immédiat au contrat de bail en cas de faute du locataire. Il n’a besoin ni de respecter un quelconque préavis, ni d’attendre la prochaine échéance du contrat. Dans ce cas il ne s’agit pas d’une résiliation, mais d’une résolution du bail. Pour obtenir cette résolution judiciaire, le bailleur saisira par simple requête le juge de paix du lieu où se trouve le logement donné en location.
S’il le préfère, le bailleur peut invoquer la faute du locataire comme motif grave et légitime et résilier le bail sur cette base. Il doit dans ce cas respecter le délai de préavis applicable en la matière.
- Résiliation par le bailleur pour motif grave et légitime
S’il existe pour le bailleur des motifs graves et légitimes pour résilier le bail – p.ex. s’il souhaite y exécuter des travaux dont l’envergure est telle que leur bon déroulement exige que les lieux soient libres d’occupation – il peut donner congé au locataire. Il doit cependant observer certains délais :
La résiliation pour motif grave et légitime peut se faire :
• soit à l’échéance du bail, lorsqu’il est à durée déterminée,
• soit avec un préavis selon l’usage les lieux qui, suivant la jurisprudence est de 2 mois dans les communes relevant de la juridiction du tribunal de paix d’Esch-sur-Alzette et de 3 mois dans les autres communes, y compris Luxembourg, s’il s’agit d’un bail à durée indéterminé,
• si le bail à loyer prévoit un préavis différent, c’est celui-ci qui doit évidemment être respecté, du moment qu’il est en faveur du locataire.
Selon la loi, le bailleur doit "établir" les motifs graves et légitimes. La charge de la preuve lui appartient donc en cas de contestation par le locataire.
Par contre, contrairement à la résiliation pour besoin personnel, la lettre de résiliation pour motifs graves et légitimes n’a pas besoin de mentionner un quelconque texte de la loi. D’ailleurs, la résiliation n’est liée à aucune forme, elle n‘a même pas besoin d’être écrite et pourrait être verbale voire tacite, sous réserve des difficultés de preuve d’une telle résiliation.
- Résiliation par le locataire
Le locataire peut résilier le bail sans avoir à invoquer une quelconque raison. Il doit cependant respecter les délais en la matière. Ainsi, il doit respecter l’échéance du bail si celui-ci est à durée déterminée. A défaut, il peut être condamné à payer au bailleur le loyer nécessaire jusqu’à la relocation, plus éventuellement des dommages-intérêts.
Au cas où il a conclu un bail à durée indéterminée, le locataire doit respecter le préavis suivant l’usage des lieux, qui est le même que celui du bailleur en cas de résiliation du bail pour motifs graves et légitimes et que nous avons décrit ci-dessus, à savoir 2 respectivement 3 mois.
- Résolution pour faute du bailleur
Au cas où le bailleur ne respecte pas ses obligations, le locataire peut demander la résolution judiciaire immédiatement, sans condition de préavis ou de respect de l’échéance. Mais la résolution du bail n’est effective qu’avec la décision rendue en justice. Jusque-là le locataire reste tenu par son contrat.
Toutefois, s’il souhaite éviter de recourir à une procédure judiciaire, le locataire peut invoquer la faute du bailleur pour résilier le bail à l’échéance, respectivement avec préavis en cas de bail à durée indéterminée.
- Résiliation d’un commun accord
Même si la loi ne le mentionne pas expressément, un bail à usage d’habitation peut toujours être résilié d’un commun accord. Ni une forme particulière ni un délai de préavis ne sont dans ce cas imposés aux parties. Il est toutefois prudent de documenter cet accord par écrit pour éviter tout problème éventuel de preuve par la suite.
Pour le bail commercial les conditions de forme sont différentes que celles relatives au bail de logement.
- Forme
Aucune forme n’est prévue en cas de résiliation d’un commun accord. La résiliation peut être orale, écrite et même tacite.
La résiliation avec préavis se fait par n’importe quel moyen écrit, sauf si le contrat prévoit l’obligation d’une lettre recommandée. Evidemment des problèmes de preuve peuvent se poser en cas de courrier simple. Une indication des motifs dans la lettre de résiliation n’est en principe pas requise, sauf si les parties avaient prévu une telle obligation dans le contrat.
- Délai
Les parties peuvent prévoir un délai de préavis dans le contrat de bail à durée indéterminée. A défaut, le délai d’usage s’applique qui, selon la jurisprudence, est de 6 mois. En cas de résiliation pour faute, aucun délai de préavis n’est à respecter, la résolution peut être demandée immédiatement.
Enfin, notons que dans le contrat à durée déterminée qui ne contient pas de clause de renouvellement, une résiliation n’est pas nécessaire – il cesse de plein droit à l’expiration du terme convenu.
Le juge examinera si la volonté des parties a été de signer principalement un bail d’habitation ou un bail commercial et il appliquera les conditions de forme relatives au bail qui, à ses yeux, a été prépondérant dans la volonté des parties.